Cette semaine, on célébrait l’anniversaire de sortie de l’album, il y a 31 ans, le 15 janvier 1990… L’occasion de parler un peu de cet album important pour moi.
Série - Les albums à ne rien faire d autre qu écouter
17 janvier 2021
The Sundays : reading, writing and arithmetic
Par Tomek le 17 janvier 2021, 18:17 - Musique
23 mars 2023
Stina Nordenstam - Dynamite
Par Tomek le 23 mars 2023, 22:07 - Musique
Ça fait bien longtemps que j’aurais dû parler de ce disque.
De cette artiste majeure et discrète, très discrète. Tellement qu’elle n’a pas sorti de disque depuis 2004. Qu’un suivant avait été annoncé sur le site officiel (fermé depuis) où “Coming soon” était indiqué, et… plus rien.
J’en parle car ce matin tôt, je me suis réveillé avec le souvenir d’un rêve (étrange, comme tous les rêves) où apparaissait Stina, je ne comprends pas trop le contexte mais je la vois derrière un comptoir, chanter mais sans le son. Là, je me dis qu’elle chante encore que tout espoir n’est pas perdu… je vais pour dépasser ma timidité et lui adresser la parole et elle se transforme, non, le lieu est différent et l’apparence aussi, elle est aux côtés de 2 autres femmes et devient une sorte de petit corps informe translucide et coloré qui englobe ma main alors que j’essaie de le/la toucher, tellement étonné par cette transformation instantanée.
Comment ne pas mieux la représenter ? Insaisissable.

Mais revenons à ce disque. Dynamite est son 3e et date de 1996[1]. Et le moins que l’on puisse dire est qu’il n’incite pas à la rigolade. Alors que ses précédents albums étaient plutôt doux, à base piano ou guitare acoustique, celui-ci est rêche, électrique, tendu, la guitare saturée est jouée sur 2 cordes, les percussions sont distordues, et des arrangements de cordes (et parfois de vents) accentuent la dramaturgie des morceaux. Les thématiques ne sont pas en reste, avec des histoires (vraies) de meurtres, des amours perdues, des messages de détresses… Alternant les titres dépouillés (mais où la tension est palpable) et d’autres résolument plus saturés et arrangés, la voix enfantine de Stina, souvent nimbée d’effets nous enveloppe d’une douceur inquiétante.
La production est fantastique, les arrangements, l’interprétation, tout concourt à faire de cet album un chef d’œuvre.
Et que dire de la pochette ? Comme un manifeste de gauche[2], étoile à 5 branches peinte en rouge sur un fond blanc sale, efficace et sans fioriture, comme le titre. Au verso, une photo de Stina [3] en noir & blanc, l’air fermé, sévère, on la reconnait à peine.
Un album qu’on savoure sans retenue, sans autre distraction, à écouter le soir, fort, dans la semi-pénombre.
4 avril 2023
Juno - This is the Way it Goes and Goes and Goes
Par Tomek le 4 avril 2023, 09:03 - Musique
Ce groupe a sorti 2 albums, une poignée de EP et singles, et n’est pas franchement connu. Il se trouve que son 1er album est sorti il y a tout juste 24 ans, le 30 mars 1999. Comment ai-je connu ce groupe ? Vraisemblablement chez ma disquaire de l’époque, Chantal, au Sneakers, son magasin[1].
Il y a 4 ans, KEXP, l’excellente radio de Seattle consacrait un article à cet album… et à l’histoire du groupe. Une bonne occasion de se remémorer les souvenirs partagés avec eux par le biais de 2 concerts inoubliables, sans doute dans les meilleurs ou les plus intenses, puissants & humains que j’ai vus.
Nous étions partis pour Saint Étienne ce soir-là (c’était au printemps 2001 semble-t-il) avec quelques amis découvrir en live le groupe qui avait sorti l’album dont on cause ici. Pas de salle de concert, non, une maison en hauteur au-dessus de la ville, sans doute un squat à l’époque, je n’ai plus le contexte mais on faisait pas mal de concerts à Lyon ou environs dans des lieux de ce genre. On arrive, c’est une petite pièce, on est littéralement collé aux musiciens, on doit être quoi, 30 maximum, autant dire que l’ambiance va être chaude. Et c’est une déflagration : les 3 guitares, la basse, la batterie le chant envoient une charge sonore tout autant précise que puissante. Un inédit à l’époque qui s’avérera être “Help is on the way” sur le 2e album sorti quelques mois plus tard s’incruste dans ma tête, avec son riff de guitare entêtant et ver d’oreille instantané. Une claque intégrale !
Autant dire que l’album suivant est attendu avec impatience, autant que la tournée qui n’arrive que quelques mois plus tard (la chance !).
Le temps que je me remette les idées en place, je me souviens avoir écrit un live report du 2e concert, à l’Usine à Genève cette fois, et en recherchant dans mes archives, au fond d’un vieux disque dur, je retrouve le texte, alors publié sur Indiepoprock et toujours disponible, mais mal crédité[2]. Je le copie ici pour la postérité (ahah).
Le souvenir de Juno lors de la tournée de printemps avait laissé des traces : une certaine frénésie m’habite alors que je me rends à Genève – accompagnés d’insouciants de mon espèce – par un temps à ne pas mettre une autoroute dehors, de peur de la voir se jeter sans mesure sur les véhicules déversant des rivières absurdes et désinvoltes.
Après un album sorti en été, juste le temps de se refaire une santé, et hop, les revoilà en Europe, prêts à déverser des flots de notes à pleines pelletées au vieux continent ébahi devant tant d’à propos.
Ce sens de l’à propos a dû manquer au programmateur de l’Usine qui nous a permis de nous ennuyer un moment en compagnie de Lunazone, groupe helvète aux accents rock’n rollien et parfois emo-rockien scolaire, histoire de nous impatienter encore plus.
Bref, passé cette 1ère partie dispensable, Juno arrive enfin et attaque par le 1er morceau du dernier album en version chantée, donnant une densité que celui-ci n’avait pas sur disque. L’espace sonore est rempli, les frissons apparaissent dans l’échine et ne retomberont que bien plus tard au retour. Le son est moyen et ira en s’aggravant (il est sourd, ce sonorisateur, à faire un mix aussi agressif ?), mais l’énergie passe, non, pas seulement, l’émotion est palpable alors que s’égrènent les meilleurs morceaux du groupe, des sortes de longues pièces atmosphériques et rampantes, qui se dressent un moment, finissent montagnes d’où l’on surplombe à loisir un monde aux couleurs renouvelées. Les autres titres, plus directs, sont exécutés (B-L-A-M !). Le tout emmené par la voix toujours au bord de la rupture, ce chanteur au charisme proche d’un Troy (Chokebore) est toujours en tension au long des morceaux, profitant alors des réaccordages pour glisser quelques mots qui dévoilent toute sa simplicité et sa générosité. Ah, j’allais oublier ce fabuleux entrelacement de guitares – parfois 3 ! – qui laisse pantois, tant dans sa forme épurée que dans les explosions bruitistes de fins chaotiques (mais pas trop, finalement).
Un rappel, malgré la fatigue du groupe : une des 40 personnes présentes (environ) demande : » le titre du 1er album qui n’en finit pas de monter, d’accélérer? » [traduction aléatoire, mais assez proche du sens, il me semble]. Résultat : le morceau phare (« Leave a clean camp and a dead fire ») de cet album, 10 minutes de bonheur pur pour achever de convaincre les non convaincus (mais en restait-il vraiment ?) de l’événement auquel ils ont pu assister ce soir du 5 décembre 2001, déjà gravé dans les mémoires.
Pour l’occasion, un label lyonnais (Modern City Record, par ailleurs tourneur de Juno en Europe) a, comme pour la précédente tournée avec le 1er album, sorti le nouveau disque en édition limitée double vynil coloré, superbe objet rudement recommandé.
Si.
Leurs albums alternent entre morceaux plutôt atmosphériques (avec des guitares, hein, c’est pas du new age non plus) et répétitifs, et d’autres pan! dans ta face comme ce “All your friends are comedians” jouissif ! Impressionnant autant dans l’énergie déployée que dans le talent de composition qui fait mouche tout en étant bien élaborée. Leur usage du delay est aussi remarquable dans le sens où les guitares forment des textures sonores, sorte de magma (é)mouvant, le fait d’avoir 3 guitares permettant une ampleur inédite. Et la voix, cette voix qui emporte tout sur son passage, ces histoires humaines dans tout ce qu’elles ont de complexe et touchant, déclamées avec une passion rarement égalée…
Je vous laisse avec ce fantastique morceau quasi instrumental de 10 minutes en version concert, à partir en transe, se laisse transporter loin loin au-delà de toute frontière…
Et si vous préférez la sagesse d’une version studio, la voici.